Archives mensuelles : juillet 2015

Metz (juillet / aout 15)

Dimanche 9 août 2015

Salut !

(…)

La bagarre pour obtenir la promenade « à l’air libre » au QD de Metz (tant coté hommes que femmes) continue. J’ai fait quantité de courriers et certains ont payés car lundi dernier j’ai été appelée pour rencontrer 2 déléguées du CGLPL (Contrôleurs Généraux des Lieux de Privation de Liberté). Mais je saurai demain si la direction a décidé ou non de rester hors la loi. En effet, durant les peines de mitard précédentes (3 jours+12 jours+14 jours), j’ai fait des refus de réintégrer quotidien et ça passe en CDD demain : je risque donc 14 jours à nouveau.

A l’UHSA, on avait 6 sortie d’1/4 d’heures dans la journée pour fumer la clope puisque c’était impossible en cellule (qu’ils appellaient « chambre »). La première était à 8h, après le petit dej’, la dernière à 19h30. A Bron, il y a 3 ans, c’était seulement 3 fois 20 minutes par jours, ce qui était insuffisant et qu’ils compensaient par des patch de nicotine.

Là, je viens de passer une semaine de détention « normale », mon record à Metz. J’ai pu aller au sport mais le rameur est cassé. Il y a aussi eu une activité de 2 fois 1h30 et j’ai fabriqué un chouette petit nounours pour ma nièce. J’ai eu 2 heures de promenade collective par jour (9h-10h et 14h-15h ou 10h-11h et 15h-16h) où j’ai vu un maximum de 7 autres filles car ils séparent les ailes. Je n’ai pas trouver de potes, mais je discute en un ? Rigolo fait de français, d’allemant et d’espagnol avec une gitane serbe et une russe et c’est plutot sympa. La population de la MA est très majoritairement faite de nanas paumées et/ou toxicos, influencables sur l’instant mais difficile à politiser.

Ainsi, notre lettre collective pour obtenir des douches tous les jours et plus de promenades durant la canicule a été traitée simplement par ma mise au QD sous un pretexte bidon et le pourrissement. Quand j’ai voulu relancer la machine après 12 jours de mitard, des filles m’ont insultées dans la même logique que ce que l’AP avait fait à Epinal. Je suis dans l’aile la moins peuplée et la moins francophone pour ne pas pouvoir avoir trop d’influence. A chaque ouverture de cellule, il y a 2 matonnes et un bricard, donc je vais souvent à la douche seule, en décalé.

Ce qui me choque le plus c’est l’empressement de l’aumonnerie chrétienne (tant catho que protestante) à s’associer à cette volonté d’humiliation de a part de l’AP. En dépit de la loi, les aumoniers refusaient de faire ouvrir la grille au QD pour me rencontrer. L’aumonière protestante est allé jusqu’à me citer un passage de l’évangile de Paul : « les justes n’ont rien à craindre des magistrats, les méchants seront punis. En effet, nul ne doit s’opposer aux autorités car elles représente la volonté de Dieu » (je te résume le truc de mémoire) ! Ah, l’alliance du sabre et du goupillon…éternelle !

La rencontre avec l’imam a été bien plus sympa, mais c’était durant cette semaine et il n’avait pas à prouver qu’il me recevait correctement. On verra la semaine prochaine…

A propos de la promenade au mitard, il y a quand même une différence entre le QH et le QF. Les mecs ont droit à 2 « promenades » par jours dans cette cellule vide, une le matin, une l’après midi, soit 3 heures par jours selon le reglement interieur. Nous, c’est juste une heure, de 8h à 9h. Durant les 14 derniers jours, ils se sont même amuser à m’apporter le courrier qu’à la gamelle du soir (entre 17h et 18h selon la disponibilité du bricard) alors qu’il est distribué vers 13h30 aux filles en cellules.

(…)

Le 4 août, j’ai pu voir ma mère et ma soeur durant 1h40 au parloir, (…). Le 18 je vais voir une pote de retour de vacances (…). C’est tellement loin de venir me voir que c’est toujours cumulé à une autre occasion de sortir de Provence. Et la France est organisée de telle façon, qu’à moins qu’ils m’envoyent à Toulouse ou à Bordeaux, il faut toujours passer par Paris. Ça permet à mes parents d’aller voir assez souvent ma grand-mère qui vieillit très mal. J’aimerai bien la revoir un jour, mais rien n’est moins sur…

Une demande de condi est en route mais mon SPIP est en congé depuis 4 semaines. Comme la dernière fois, j’ai tous les papiers qu’il faut, mais je crains que cela ne suffise pas… ça devrais être examiner au plus tard le 1er novembre, quelle que soit la taule ou je serai à ce moment là.

(…)

Lundi 3 août 2015, Metz

[…]

Ce matin, alors que j’étais en promenade avec les autres filles (je faisais voir les photos du troupeau à I et on bossait du vocabulaire qui ne lui servira à rie ici!), j’ai été appelée pour voir 2 nanas déléguées du CGLPL. Elles m’ont dit qu’elles avaient fait le déplacement de Paris car elles savent qu’ils mettent beaucoup de temps à me répondre et ne voudraient pas que je sois en colère car cette lenteur les agace aussi. On a fait le point sur les bagarres où je leur avais demandé de l’aide. Et surtout, elles ont été voir la « cour de promenade » du QD. Elles ont reconnu, un peu piteuses, qu’elles n’avaient pas épinglé la direction sur ça lors de leur dernière visite, même si elles ne « validaient » rien. Deux heures plus tôt, j’avais fait partir un courrier à la DI où c’est ce que j’expliquais. Bon, en tout cas, ça avance et même si moi je n’en profiterai pas (à cette heure, je n’ai pas eu de convo pour un prétoire, mais pas non plus d’infos sur un transfert), ça payera un jour !

[…]

Je t’embrasse. Salue tous ceux qui le veulent.

Mercredi 29 juillet 2015

[…]

Ne t’inquiètes pas pour mon genou, ça fait des mois que je n’ai plus mal (début décembre 2014). Mais l’IRM a relevé des petites lésions et je veux être capable de courir derrière les brebis quand ils me lâcheront enfin. Depuis 1 an, je n’ai guère fait de sport à cause du QD à répétition alors je ne sais pas s’il tiendrait sur un effort prolongé. C’est bien qu’il y ai enfin ce RDV prévu mais je croise les doigts pour que ça ne soit pas le 4 au matin quand MJ et L viendront au parloir !

Le transfert semble remis à plus tard. J’ai eu la visite il y a une heure d’une briscarde qui me sortait 3 CRI du chapeau pour les refus de réintégrer le mitard quotidien sans promenade au QD. S’ils comptent faire une CDD c’est qu’ils pensent me garder un moment à Metz encore… J’espère quand même qu’il y aura une pause et que je pourrai t’appeler le lundi 3 au matin vers 10h comme prévu. […]

Ici, il fait nettement moins chaud. Je dois remettre la polaire dans la journée et la couverture la nuit. J’espère que c’est plus respirable aussi à Alès.

A bientôt, Bises

Christine

Jeudi 23 juillet 2015

[…]

Je n’ai pas encore été en GAV pour « l’incendie ». [la menace à Strasbourg] s’est dégonflée… Je m’emmerde tellement au mitard (et il va y avoir 2 week-end sur cette peine, donc 4 jours sans courriers…) qu’une journée de GAV ne me déplairait pas. Les gendarmes sont en général plus réglos que les flics, mais ça fait une « sortie »…

J’imagine qu’il doit faire bien chaud à Alès. Courage ! Ici ça a été très dur 5 j début juillet. Maintenant c’est supportable. […]

J’ai branché l’OIP et le Défenseur des droits à propos de l’absence de promenade au QD de Metz (tant au QF qu’au QH). J’ai aussi écrit au CGLPL. Mais je sens que ça va être long car la direction a choisi le mépris. Ils m’ont dit qu’ils ne mettaient plus de CRI quand ils me portaient pour me remettre au mitard après 1h de « promenade » dans la cellule à côté, tous les jours à 9h. Est-ce vrai ?

Ce qui est sûr, c’est que la revendication pour avoir les douches quotidiennes n’aboutira pas. Quand je sortirai du QD, ça fera 1 mois qu’on aura rédigé la lettre collective, 20 % des filles auront changé (on est en MA, pas en CD) et la météo aussi. Et même si je proposais un refus de réintégrer (où je serai seule à risquer le QD), ça ne prendrait pas, les filles sont trop institutionnalisées. Et puis, bon, j’ai déjà la bagarre pour la promenade au QD sur le feu, je peux pas tout faire toute seule…

[…] Bon, allez, puisque tu aimes les blagues, je finis sur une traditionnelle :

C’est un gars qui s’emmerde en cellule en attendant la distribution du courrier. Enfin, il arrive et le gars ouvre la lettre :

«  Cher fiston,

j’espère que tu vas bien, que tu es en bonne santé.

Moi ça va. Mais, à la ferme, il y a beaucoup de travail. Le voisin va labourer la grande terre avec son tracteur. Mais il dit que la parcelle derrière la grange est trop petite. Il va donc falloir que je la fasse au motoculteur et ce n’est plus de mon âge. Toi, bien sûr, tu serais capable de la faire à la main !

Je ne devrais pas te dire ça car je sais que tu préférerais être ici, à travailler. Mais, que veux-tu, il ne fallait pas faire le con !

Je t’embrasse et viendrai au parloir dans 2 semaines.

Papa »

Aussitôt, le gars prend son stylo et écrit :

« Cher Papa,

surtout ne touches pas à la petite parcelle derrière la grange ! C’est là que j’ai enterré toutes mes affaires ! Bises »

Le lendemain, le vieux voit débarquer à la ferme quantité de voitures bleues. Il y a les gendarmes, mais aussi la scientifique et le groupe cynophile. Il y a énormément de monde. Ça crie, ça se bouscule. Ils sortent les détecteurs de métaux, les pelles, les pioches, les balayettes, les chiens. Ils trafiquent derrière la grange. Les hommes creusent, les chiens grattent, tout le monde crie. C’est assez effrayant, très remuant et bruyant.

Le vieux, un peu affolé par ce déploiement, décide de les laisser faire et siffle son chier pour aller faire une petite ballade. Au portail de la ferme, il voit qu’il y a du courrier dans la boîte. D’habitude, le facteur lui remet en mains propres et ils boivent un godet ensemble, mais il a du avoir peur de ce déploiement de gyrophares bleus lui aussi… Alors le père ouvre la boîte et y trouve une lettre du fiston :

« Papa,

je pense que maintenant les labours doivent être finis partout et la petite terre bien retournée.

Tu peux toujours compter sur moi : je serais toujours un paysan et à tes côté.

Bises »

Bises aussi à toi, à bientôt.

Mercredi 22 juillet 2015, Metz

[…] le 5 juillet, au plus fort de la canicule, on a rédigé une lettre collective au QF pour réclamer des douches tous les jours et plus de promenade. La direction a choisi le mépris et n’a pas répondu. Durant ma petite pause de QD, le 19, on a fait une autre lettre, plus ferme, exigeant une réponse cette semaine. Ils doivent être bien contents que je sois au mitard pour ne pas avoir à gérer un refus de réintégrer la promenade à 16h vendredi… Les filles ne feront rien si je ne les pousse pas et, d’ici, ce n’est pas facile. Et puis, je suis déjà en train de me battre pour la promenade au QD… Les menaces et pressions ont déjà eu lieu sur les filles : 15 signataires à la 1ère lettre, 7 à la 2ème…

[…]

Mardi 21 juillet 2015

Salut !

J’ai reçu aujourd’hui copie d’une lettre adressée à tout un tas d’enfermeurs par un groupe « enfin pisser dans l’herbe ». […]

Je suis d’accord à 100 % avec ce qui a été écrit. J’apprécie autant le fond que la forme (l’absence de salutations finales par exemple). Ca été du bon travail d’arriver à exprimer autre chose que du dégoût et des basses insultes contre FO et Vosges Matin après avoir reçu leur merde. […]

Quadn j’ai appris vendredi 11 juin, en croisant des filles en allant téléphoner (la cabine n’est pas au QD), que cet article était sorti le 9, je leur ai demandé de me le faire passer. Mais le lundi 14, elles ne l’avaient pas laissé sous la douche. J’ai donc écrit le 15 à Vosges Matin pour leur en demander une copie et ils n’ont jamais répondu. [http://www.vosgesmatin.fr/edition-d-epinal/2015/06/09/une-detenue-qui-pousse-a-bout-le-personne ] […] puis j’ai reçu la copie chopée sur internet […]. J’ai fait quelques courriers internes aux filles pour leur dire qu’elles avaient été manipulées. J’ai aussi lancé quelques insultes à des matons encartés FO. Bref, l’info complète a été très longue à m’arriver. […]

Sinon, comme vous le savez peut-être, j’ai pris 14j pour un « incendie » après 8j pour une « inondation » et il y a un paquet de CRI en stock pour « refus de réintégrer ». Tout ça pour réclamer le minimum : 1 heure à l’air par jour, même dans une cour bétonnée et surmontée de films anti-hélicoptère. Je maintiens la bagarre en essayant de ne pas leur laisser la possibilité de m’envoyer encore au pénal. La directrice m’a fait comprendre que je ne m’éterniserais pas dans cette MA.

J’aimerai quand même avoir mon extraction médicale à l’hosto de Metz pour mon genou avant de dégager… Elle était prévue à Poitiers il y a 6 mois, puis refusée (pas l’extraction, l’examen) à Strasbourg, puis trop tardive à Epinal. L’UCSA m’a dit que « ça sera avant fin août », c’est déjà une indication sympa de leur part.

Pour finir sur une note littéraire, j’ai lu « Zonzon » de Guyard dans la nuit. C’est bien sympa, du bon polar. Ça m’a fait penser au film « Le Prophète », en plus drôle : fiction, prison, polar, crédibilité. Guyard doit même venir en parler ici (mais au QH, bien sur!) un de ces quatre.

19 juillet

Salut à toi !

(…)

Je suis désolée des galères de Nabil. J’espère que les conditions de détention sont plus vivables en Espagne qu’en France et qu’il aura vite ses permis de visite. J’espère aussi que pendant ce petit temps à l’air libre il n’aura pas chopé de nouveaux chefs d’inculpation. J’ai entendu dire qu’en Belgique le délit d’évasion n’existait pas car tout homme est en droit de chercher la liberté. bien sur, ils contournent en accusant de « prise d’otage », « violence », « dégradations de biens publics » ou autre, mais pour une évasion « propre » ( un échange lors d’un parloir ou un non retour de perm par exemple), n’est pas punissable en sus. Mais peut être est-ce une légende ?

(…) Dans 2 semaines, je verrai ma mère et ma sœur. Étant donné la distance, on devrait avoir à nouveau une prolongation.

Quand je suis arrivée à Mets, ils ont fait très fort sur la stigmatisation pour m’isoler des autres filles ( ici, il n’y a pas de QI). Mais ils en ont trop fait et se sont ridiculisés en intervenant à 12 agents dans la cour où une me cherchait la merde alors que je ne l’avais pas menacée et qu’on ne c’était pas touchées. Ils m’ont mise au mitard en prévention et je n’ai pris « que » 5 jours.

Mais ici, et c’est la seule taule où j’ai vu ça, il n’y a pas de cour au QD pour la promenade. Ils nous mettent une heure par jour ( de 8h à 9h, ce qui ne coupe pas la journée) dans une cellule vide à coté. J’ai refusé, j’ai essayé d’expliquer mais ils n’ont rien voulu entendre et osent affirmer que cette « cour fermée » a été homologuée par le CGLPL.

Le 1er jour, j’ai déclenché l’alarme incendie, le 2ème j’ai provoqué une inondation, ensuite je les obligeais à être 4 ou 5 pour me rentrer au mitard a 9h, tout ça en signe de revendication. j’ai aussi écrit au Défenseur des droits ( j’ai rencontré la déléguée lors de sa permanence le 15 juillet), au CGLPL et à l’OIP. Il y a déjà eu des retours selon la direction.

J’ai pris 8 jours de plus pour l’inondation, jusqu’au jeudi 16. Je repasse demain au prétoire pour 3 autres CRI ( les refus de réintégrer ont été classés sans suite m’a dit la directrice quand elle est venue me voir au QD le 15 au soir). J’ai comme dans l’idée que je vais prendre du confinement demain car ils savent que je continuerai à bloquer la « promenade » au QD et qu’ils vont vite se faire taper sur les doigts…je vous tiendrai au courant…

La directrice m’a fait comprendre qu’elle ne serait pas déçue si j’étais vite transférée. Ma foi, moi non plus… surtout si c’est pour un CD avec des UVF ! Je pense aussi que cane va pas traîner car j’ai entraîné les filles à revendiquer des douches quotidiennes et 3h de promenade par jour en cette période de chaleur. Ils ont bien compris que des que je ne serai plus là ça redescendra comme un soufflé : c’est le même type de population qu’à Epinal ou à Strasbourg, des toxicos influençables.

Et puis, ça leur coûte cher en énergie, à l’AP, d’essayer de me faire passer pour dangereuse. Ils doivent être au moins à 3, dont un chef, à chaque fois qu’ils ouvrent la cellule ou que j’ai un mouvement.

Non seulement ça ne prend plus avec les filles, mais ce WE on y a gagné 1/2 h de promenade, le temps que le surnombres soient disponibles 🙂

Par contre ça a bien pris avec les toubibs, ( UCSA ou SMPR) et les aumôniers qui refusent de faire ouvrir la grille pour me voir au QD.

Ils ont même dit à l’avocat commis d’office pour le prétoire du 7 qu’ils ne me démenotteraient pas pour notre entretien en tête à tête ! Et ce con a accepté… Alors j’ai sorti la main du bracelet pas trop serré quand on était tous les 2.

Et pour le prétoire du 9, il leur a bien dit d’arrêter leurs conneries et ça a été entendu…

Enfin bon, tout ça pour dire que quand ils veulent jouer la parano, il n’y a plus qu’eux qui y croient… Et c’est à nous que le JAP demande des attestations de suivi psy…

J’ai lu le bouquin que tu m’as envoyé en 3 heures [ bouquin écrit par une femme assesseur civile en commission disciplinaire dans les prison qui raconte son expérience]. J’ai été bien moins choquée que toi par la personnalité de l; auteur. Bien sur c’est une bourgeoise bien pensant, mais ça fait 2 ans 1/2 que je ne vois que ça ( ou alors des pervers violents) et ça ne me choque plus. E puis je suis sure qu’il y en a énormément comme ca dehors aussi. J’ai même trouvé que c bouquin avait du bon car cette naïve cite plusieurs textes de lois qui peuvent nous être utiles, un peu comme le guide de l’OIP. J’ai donc décidé de l’offrir à la biblio du QF après avoir corrigé 3 petites fautes dans la marge.

# on ne peut pas porter de polo bleu marine, n’en déplaise à cette amatrice de mode qui détaille nos fringues

# il n’y a pas de frigo au mitard

# si des avocats ne mettent pas leurs robes au prétoire ce n’est pas forcément un manque de respect vis à vis de nous, mais pour signaler au directeur qu’il n’a pas le droit à la déférence due aux juges puisqu’il n’en est pas un.

Vers la fin du livre, elle dit que les avocats gagnent 88 euros par prétoire et elle plus de 40 euros (…) pour 2 ou 3 heures à casser du taulard. Moi je sais par expérience que rares sont les baveux comme les assesseurs qui ont le courage et l’expérience nécessaires pour ne pas se faire manipuler par l’AP : j’en ai formé quelques uns…

Pour finir sur ce livre, il m’a fait penser à un autre « témoignage de personne humaniste qui explique aux gens biens la misère des taulards ». « dans la peau d’un maton « que j’avais trouvé à la biblio de Strasbourg sur les conseils d’une fille qui me disait « les pauvres surveillants, ils ne font pas un métier facile parfois »…

Bon allez, j’arrête les commentaires littéraires, surtout vu la qualité des bouquins en question !

(…) J’imagine que vous devez avoir bien chaud en ville. Ici, on a eu 5 jours très durs, mais maintenant c’est supportable. heureusement, moi je suis seule en cellule, alors si je veux me mettre à poil ou mouiller mon t schirt, ça ne gêne personne.

Allez, bon été à vous, à la prochaine.

Jeudi 9 juillet 2015

Salut !

J’ai été bien contente de notre parloir de ce matin. Depuis le temps qu’on l’attendait… ! C’est vrai que c’est dur de gérer le temps quand on sait qu’il est compté. […]

Je suis donc retournée au mitard à 11h15, après une fouille à nu comme je l’avais prévu bien qu’elle ne soit pas justifiée. Je n’ai pas voulu lutter sur ça, j’ai juste râler un peu pour la forme, car je savais que tu étais bloquée dans ce box depuis déjà presque 3h. Au mitard, j’avais le Canard Enchaîné cantiné durant les 4j de pause, le tabac (mais je me suis trompée dans la commande et je devrais faire cette semaine avec des cigarillos) et la gamelle. Mais toujours pas le Voltarène que je demande depuis qu’ils m’ont tordu le bras dimanche soir !

Peu après, ils m’ont remis une lettre que la directrice a faite au proc’ de Metz le dimanche 5 où elle raconte (presque honnêtement) pourquoi le plafond du sas du mitard est noir de suie. Je ne doute pas que je vais bientôt avoir le droit à une journée de GAV…puis un procès à Metz…puis quelques mois de plus… On en sort pas ! […] Tu te souviens qu’à Strasbourg aussi j’avais vu une gendarme au parloir suite à une plainte d’une matonne pleurnicharde. J’ai eu raison de ne pas en parler aux parents puisqu’elle a été enterrée par le proc’ (eh oui, des fois ça arrive…enfin, ça arrive même souvent aux plaintes que nous on dépose!) […]

Le prétoire n’a commencé qu’à 17h car il y avait des mecs à passer avant. Du coup, les membres de la commission étaient fatigués et moi pas mal tendue. Mais tout s’est mieux passé que mardi car ils ne m’ont pas menottée cette fois. […] Je passais pour 3 CRI : insultes au toubib qui refuse la visite le 30 (mais aussi mardi et je n’ai toujours pas le Voltarène!), feu à l’alarme incendie le 5 et inondation volontaire le 6. En fait, il y a eu un problème de procédure pour le CRI pour le feu et il repassera plus tard. Mais même pour l’inondation je pouvais prendre 20j. Comme mardi où je risquais 14j et où ils m’en ont mis « que » 6, ils ne m’en ont mis « que » 8. Ça mène au jeudi 16. Mais je ne doute pas qu’ils feront un autre prétoire d’ici là pour rallonger la sauce. Entre le feu et les refus de réintégrer, ils ont encore 10 CRI en stock.

Bon voilà pour ces infos, suite au prochain épisode…

Dans l’aprem’, j’ai fini « Les naufragés de l’autocar » de Steinbeck, moins revendicatif que « Les raisins de la colère » mais tout aussi bon sur le portrait des personnages. […]

À propos de Christine Ribailly, adresse à tous les enfermeurs

Ci-dessous, une lettre ouverte envoyée aux institutions judiciaires et pénitentiaires en réaction à un article paru le 9 juin 2015 dans le quotidien Vosges Matin. Cet article est une tribune sur la situation de Christine Ribailly (à l’époque incarcérée à la maison d’arrêt d’Épinal) donnant la parole à Mme Fadila Doukhi, déléguée syndicale de la section FO pénitentiaire des Vosges.

Incarcérée depuis plus de deux ans et demi, Christine se trouve dans un rapport de force quotidien avec l’administration pénitentiaire pour se faire respecter face à des conditions de détention toujours plus difficiles pour l’ensemble de la population carcérale. La corporation de matons d’Épinal, comme bien d’autres, n’aime pas les récalcitrants et cette fois-ci a voulu faire connaître ses élucubrations sur la manière dont elle voudrait voir gérer l’incarcération de Christine par l’administration pénitentiaire. Après avoir, une énième fois, pleurniché sur ses conditions de travail, cette corporation ose ici demander à ce que les protestations de Christine soient considérées comme manifestations de folie afin de la faire interner et ne plus l’avoir dans les pattes.

Le courrier ci-dessous vient rappeler à ces sordides apprentis toubibs que personne ne leur a demandé leur avis et qu’ils peuvent donc se le garder !

Pour l’instant, Christine est toujours en détention, et heureusement pas en institution psychiatrique. À défaut, ces matons d’Épinal auront obtenu, fin juin, le transfert de Christine.
Elle est aujourd’hui à la Maison d’arrêt de Metz.

Face à ces efforts pour détruire les détenus et leurs résistances en prison, restons attentifs à l’évolution de la situation de Christine.

Pour continuer de lui écrire :
Christine RIBAILLY, écrou 57937, 1 rue de la Seulhotte, BP 95020, 57071 METZ cedex 3

Pour en lire plus: https://enfinpisserdanslherbe.noblogs.org/

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A l’attention particulière de
FO Pénitentiaire des Vosges
la direction de la MA d’Épinal
la Direction Régionale de Strasbourg
la Garde des sceaux
la Rédaction de Vosges Matin
la direction de la MA de Metz

OBJET : Situation de Mme Christine RIBAILLY, anciennement détenue à la MAF d’Épinal  – Réaction à l’article de Vosges Matin paru le 9 juin 2015

Mesdames, Messieurs,
Nous venons ici attirer votre attention sur la situation de Mme Christine Ribailly, actuellement incarcérée à la MAF de Metz, et précédemment, à la MAF d’Épinal. Dans un même temps, nous souhaitons réagir à l’article « Une détenue qui pousse à bout le personnel » paru dans le quotidien Vosges Matin du 09 juin 2015. Véritable tribune d’une section syndicale de surveillants qui se veulent à la fois juges, psychologues et médecins, cet article autorise et soutient ces surveillants dans un exercice qui dépasse leur fonction, et vise à aggraver la situation de cette détenue dans la droite ligne du travail engagé, depuis plus de deux ans, par l’Administration Pénitentiaire et la justice. Si cet article se garde bien de la nommer, il ne fait aucun doute que la détenue dont il est question est Mme Christine Ribailly, enfermée depuis novembre 2012 pour ses insoumissions à l’autorité de différentes institutions publiques, dans la défense de ses revendications.

Dans cette tribune, la section FO Pénitentiaire des Vosges déclare, par la voix de Mme Fadila Doukhi, que la «place [de Mme Ribailly] ne serait pas en maison d’arrêt mais en hôpital psychiatrique ». Il est inacceptable qu’une corporation syndicale de surveillants s’arroge le droit de colporter les élucubrations du personnel sur l’état de santé d’une détenue. Quelle formation médicale possède ce personnel pour se permettre de tels diagnostics ?

Si par la même voix de Vosges Matin, la direction de la MAF d’Épinal veut donner à croire qu’elle ne partage pas l’avis de son personnel syndiqué, les faits montrent le contraire. En effet, rapidement la direction donnait raison à la demande de la déléguée de FO en procédant à un signalement auprès de la préfecture : le 17 juin 2015 Mme Ribailly était ainsi convoquée pour une expertise psychiatrique. Celle-ci, n’a, heureusement et pour l’instant, pas donné lieu à une décision d’hospitalisation sous contrainte.

Malheureusement, nous ne savons que trop bien à quoi peut servir le recours à l’institution psychiatrique dans la gestion des détenus par l’Administration Pénitentiaire. Loin de tout altruisme, cette pratique n’a d’autre but que de faciliter le travail du personnel pénitentiaire pour des cas de détenus trop récalcitrants au quotidien carcéral.
Dans les faits, après les traditionnels transferts disciplinaires et autres placements au mitard ou en isolement, l’internement psychiatrique vient comme ultime sanction disciplinaire appelée par l’administration pénitentiaire. L’injection de sédatifs et la camisole physique sont en effet redoutables pour ce qui est de casser toute velléité de protestation.
Le personnel pénitentiaire se voit alors rapidement soulagé. Les détenus voient leur santé rapidement et dangereusement dégradée.

Concernant Mme Ribailly, ce n’est pas la première fois que l’Administration Pénitentiaire brille par de telles pratiques ! Il y a quelques mois seulement, l’administration de la MAF d’Elsau à Strasbourg, réussissait, par un signalement similaire, à faire placer Mme Ribailly à l’UHSA de Nancy. Sitôt arrivée, la médecin psychiatre de service reconnaissait le caractère abusif de ce placement et procédait à la levée de l’hospitalisation sous contrainte.
En 2011, c’était le centre pénitentiaire de Lyon-Corbas qui faisait procéder à un même placement à l’UHSA du Vinatier à Lyon. Suite à un recours de la part de Mme Ribailly, le tribunal administratif jugea, a posteriori, ce placement abusif et demanda son annulation administrative.

Nous dénonçons ces pratiques régulières de la part de nombreuses institutions, comme l’administration pénitentiaire, mais également de nombreuses autres institutions de l’autorité publique (forces de police et de gendarmerie, justice, mairies, préfectures, etc.) qui, lorsqu’elles se trouvent face à une contestation de leur autorité, n’hésitent pas à juger comme « fous » leurs détracteurs afin de s’en débarrasser à grands coups de camisoles physiques et chimiques.

Par ailleurs, nous tenons également à dénoncer des pratiques, malheureusement trop communes, qui visent à monter les détenus les uns contre les autres. Dans le même article de Vosges Matin, il est fait référence aux soi-disant inquiétudes pour leur surveillantes, formulées par courrier, d’une dizaine de détenues de la MAF d’Épinal. Nous savons que trop bien comment fonctionne le chantage, aux sanctions d’un côté, et aux Remises de Peines Supplémentaires et petites faveurs de l’autre. Dans de telles conditions, il devient difficile de refuser quelconque demande du personnel pénitentiaire, qui quant à lui, combat toute forme de solidarité entre détenus.

Depuis maintenant plus de deux ans et demi, Mme Ribailly est incarcérée dans vos prisons. Initialement condamnée pour avoir contesté l’arbitraire dont fait preuve l’administration pénitentiaire face aux familles et proches de détenus, mais également pour son engagement contre le prélèvement ADN, le fichage de la population, la loi LOPPSI 2, le puçage et la vaccination obligatoire des brebis, et d’une manière générale, toutes les situations arbitraires générées par les autorités publiques.

Bien qu’incarcérée, Mme Ribailly continue de dénoncer les situations qu’elle subit et réprouve. En détention, il s’agit notamment des fouilles systématiques pratiquées par la plupart des établissements pénitentiaires en France et ce, malgré l’interdiction posée par la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009. Il s’agit également des cartes de circulations imposées pour tout déplacement à l’intérieur de la détention, continuum de la logique de fichage généralisé qui traverse la société. Et plus généralement, toutes les humiliations, chantages, violences, morales comme physiques, que peut produire le quotidien carcéral sur l’ensemble des détenus.

Face à toute velléité de protestation, l’administration pénitentiaire regorge de moyens disciplinaires et cela fait deux ans et demi que Mme Ribailly en fait les frais.
Nous dénonçons l’ensemble de ces pratiques :

  • Insultes, menaces et violences physiques et morales de la part du personnel pénitentiaire.
  • Chantages (suppression de parloirs, d’UVF, d’activités diverses, de repas, d’accès à la douche, de correspondances internes entre les détenu-e-s, des couvertures, des produits d’hygiène, de tabac, du droit à la défense par le refus d’appel à son avocat, de l’accès aux soins, etc.).
  • Sanctions disciplinaires telles les placements successifs au mitard puis en isolement lorsque les délais légaux sont dépassés (deux tiers de l’incarcération de Mme Ribailly passés en QD et QI), et les transferts disciplinaires à répétition et dans des établissements systématiquement loin de ses proches.
  • Plaintes à répétition de surveillants opportunistes et vindicatifs qui, par les procédures judiciaires à répétition, les lourds frais qu’elles engendrent et les ignobles dommages et intérêts qu’ils se voient accorder, ne visent qu’à user Mme Ribailly.
  • Report continuel d’une possibilité de libération par l’ajout de nouvelles condamnations prononcées en détention, par des suppressions de remises de peines et les refus systématiques des aménagements de peine auxquels elle a théoriquement droit.

Alors non, contrairement à ce qu’en disent les élucubrations des surveillants de FO, si traitement spécifique il y a avec Mme Ribailly, ce n’est certainement pas un « traitement de faveur » mais bien un ensemble de pratiques qui ne visent qu’à la faire renoncer à ses revendications, quitte à rallonger son incarcération et à mettre à mal son intégrité physique et morale, ainsi que celle de ses proches.

Dans l’immédiat, nous exigeons que cessent, sans délais, toutes les exactions précitées dont fait l’objet Mme Ribailly. Nous réclamons :

  •  Que cesse toute pression et tout acharnement,
  •  Que cesse l’ensemble des sanctions disciplinaires,
  •  Que soit abandonnée toute tentative de placement en hôpital psychiatrique,
  •  Que soit donné droit aux aménagements de peine auxquels Mme Ribailly a théoriquement accès,
  •  Que soit donné droit à sa demande de transfert dans un établissement pour peine à proximité de ses proches.

Sachez que nous restons attentifs à l’évolution de la situation de Mme Ribailly que nous continuerons de dénoncer et de rendre publique ; et que nous ne cesserons de réagir de toutes les manières nécessaires aux traitements qui lui sont faits derrière les murs de vos prisons.

Mercredi 15 juillet 2015,
Enfinpisserdanslherbe, regroupement de personnes en soutien à Christine

Pour tout contact : christinecontact@riseup.net